Lectures philosophantes

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lundi 15 décembre 2008

Synopsis du cours du 11/12/08 - Digression: Sexe, genre et sexualité 1/2

Parmi les usages multiples d'un concept, il en est un qui, sous ses airs désinvoltes et légers, permet de mieux voir notre réel. Aussi, une digression est un jeu sérieux visant à confronter notre notion de sexualité avec le concept platonicien d'in-complétude.

1/ Sexualité - notre paysage intellectuel.
Le mot "sexe", selon une étymologie possible (lat. secare), désigne d'emblée la division d'une espèce en mâle et femelle. Le sexe est donc ce qui sépare, divise en 2 genres une même espèce. Le sexe biologique, comme le fait d'appartenir, par sa naissance, à tel ou tel genre, induit dès lors aussi une certaine conformation de l'identité sexuelle à tel ou tel rôle social.
Ce faisant, du sexe découle le genre, c'est-à-dire les attributs du féminin et du masculin. De cette sexuation selon une détermination autant naturelle (sexe biologique) que culturelle (sexe social) découle, dans nos schémas de pensée, la sexualité et ses pratiques. Autrement dit, nous ne jugeons de la sexualité qu'à l'aune de la finalité qui la détermine. Ainsi de l'artificielle distinction entre hétérosexualité et homosexualité qui ne s'entend que si l'on fait de la sexualité cette pratique érotique visant un but naturel, c'est-à-dire la reproduction.
Par ailleurs, la sexualité désigne l'attirance érotique entre deux êtres. Ce faisant, le sexuel ne se cantonne pas au génital. A l'instar de ce que Freud a mis en évidence dans les 3 essais sur la sexualité (1905), le désir sexuel peut prendre des tours et détours ingénieux qui évite à l'acte sexuel de se limiter aux "frottements d'un boyau et l'éjaculation, avec un certain spasme, d'un peu de morve." Marc-Aurèle, Pensées, VI, 13. Dès lors, la sexualité, suivant une autre étymologie possible (lat. satis) vise à la satisfaction au-delà des déterminations naturelles et culturelles qui l'endiguent. Le sexuel est cet élan qui ne cesse travailler tant le corps que le psychisme.
Enfin, on pourra s'étonner que l'essentiel du discours sur la sexualité oscille aujourd'hui entre le pornographique et le sexologique. Ce discours sur la sexualité se fait scientia sexualis, c'est-à-dire objet de savoir autantqu' instrument de pouvoir sur les pratiques. La nécessité de tout dire et de tout voir qui caractérise notre époque agit paradoxalement comme une injonction à tout faire et à tout avouer.Ce faisant, ce discours dit tout sur les pratiques mais reste muet sur le désir lui-même. Du sexe, nous savons tout des façons de jouir, mais rien de ce qui anime cette volonté de jouir.

Que reste-t-il de ce paysage assez grossier de nos façons habituels de penser le sexe lorsque celui-ci est confronté au concept platonicien d'in-complétude?

2/ Sexe, genre et sexualité à l'aune du concept d'in-complétude chez Platon.
  • Là où le sexe est pour nous ce qui sépare en 2 genres distincts (mâle/femelle), chez Platon la division des êtres primitifs (mâle/mâle; femelle/femelle; mâle/femelle) ne hiérarchise pas les genres entre eux. Aussi, l'in-complétude est, dans le mythe d'Aristophane, la description d'une dynamique du désir sans assignation d'identité sexuelle tandis que, pour nous, le genre oblige nécessairement à se compléter avec l'autre sexe.
  • Notre sexe biologique nous assigne à une certaine identité sociale et une certaine typologie sexuelle (normal/anormal; nature/contre-nautre...). Autrement dit, notre identité sexuelle est déterminée par notre nature. A l'inverse, chez Platon, la source même de notre identité est mythologique, la sexualité n'étant qu'un expédient qui permet l'union entre les êtres séparés. Notre désir ne cesse d'être poussé par quelque chose qui nous demeure mystérieux.
  • Pour nous, la distincion des genres hiérarchise les sexualités, l'hétérosexualité paraissant plus normale que l'homosexualité. Il n'y a de sexualité que dans l'union du différent. A l'inverse, suivant Platon, nous sommes tous homosexuels, c'est-à-dire attiré par la moitié de moi-même.
  • Notre vision de la sexualité met certes l'accent sur le sexuel comme forme sauvage du désir que cependant le génital s'empresse de domestiquer. A l'inverse, chez Platon, la satisfaction n'est qu'un moyen dérivé de contenter un désir d'accomplissement. Aussi, le génital n'est qu'un substitut à un désir de fusion qui cherche à s'accomplir par tous les pores de la peau.
  • Pour nous, la finalité de la sexualité est commandée par autre chose que la simple satisfaction. Fondée en nature, la sexualité a une destination reproductive, quand bien même cette destination ne se réalise pas. Au contraire, chez Platon, la sexualité est seconde par rapport à la fusion des êtres. Mieux, la sexualité est un stratagème pour nous détourner de ce désir orgeuilleux de ne faire plus qu'un.
  • Enfin, pour nous, le discours sur la sexualité est normatif en tant qu'il vise à déterminer ce qui est normal et anormal. A rebours, par son mythe, Platon pose la question de notre identité telle qu'elle se construit à travers notre désir. Là où nous, nous ne pouvons parler du sexe sans dire ce qu'il doit être, Platon nous invite à réfléchir sur ce que le désir a fait de nous et fera de nous.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

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