Lectures philosophantes

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dimanche 4 avril 2010

Synopsis du cours du 1/04/10 - Quid Corpus possit (Ce que peut un Corps) 2/2



La puissance du Corps est donc la puissance comme un certain degré de relation du Corps et de l'Esprit. Mieux, il n'y a de puissance du Corps qu'au titre d'une certaine relation du Corps et de l'Esprit par rapport à ce qui les déterminent à agir ou à pâtir.

Ce faisant, c'est au titre d'une critique de l'illusion du libre-arbitre que Spinoza invoque cette formule Quid Corpus possit, mais non pour donner la primeur de toute détermination au Corps en rejetant toute forme de dessein à l'Esprit. Au contraire, le rejet du libre-arbitre doit se faire au nom d'une juste compréhension des rapports entre le Corps et l'Esprit.
Car, c'est du désir dont il est question ici, en tant que le désir est la façon dont l'homme se rapporte au réel au titre d'un appétit ou, ce qui revient au même pour Spinoza, d'un appétit avec la conscience de l'appétit (Ethique III, définition 1). Désirer, c'est être affecté d'une certaine façon, tant du fait d'une disposition du Corps déterminé par une cause extérieure que d'une aptitude de l'esprit à produire des effets.

Aussi faut-il autant entendre Quid Mens possit que Quid Corpus possit, car ce que peut le Corps est ce que peut l'Esprit. Si l'Esprit est dans l'ignorance de ce qui le détermine à être affecté de telle ou telle façon, alors sa puissance est celle du Corps, c'est-à-dire l'Esprit est disposé à pâtir selon les affections du Corps; si par contre, par une connaissance adéquate des causes, l'Esprit est apte à agir d'une façon différente de ce à quoi le dispose le Corps, alors sa puissance est celle de l'Esprit, c'est-à-dire le Corps est disposé à agir selon les aptitudes de l'Esprit. Les appétits du Corps sont les décrets de l'Esprit non en tant que l'un détermine l'autre, mais en tant que l'un et l'autre expriment un même degré de puissance. Ici, dire le Corps et l'Esprit comme s'il étaient deux choses distinctes relève d'un faux-sens, car la puissance est ici un certain degré de relation entre Corps et Esprit, c'est-à-dire un certain degré de perfection dont est capable un individu à tel ou tel moment.

Ce faisant, désirer est affaire de puissance, c'est-à-dire de dispositions du Corps et d'aptitudes de l'Esprit. Car qui désire se dispose à pâtir ou à agir de telle ou telle façon. C'est pourquoi désirer demande de se connaitre soi-même autant que de connaître ce que peut un Corps, car désirer, c'est être déterminé à agir ou à pâtir selon nos dispositions propres. Dès lors, il ne faudrait jamais dire "je te désire" avec l'assurance d'un gaillard séducteur ou d'une sémillante séductrice, mais "je désire de telle façon" avec la prudence de celui qui sait que le désir n'est pas affaire de volonté mais de puissance. Car qui désire ne fait pas ce qu'il veut, mais ce dont il est capable. Et le risque est grand de se montrer faible alors qu'on se croyait vaillant.

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